GIRARDON FRANÇOIS (1628-1715)

François GIRARDON

On a dit que François GIRARDON a fait escorte au roi Louis XIV jusque dans sa tombe.

De fait, François GIRARDON s'est éteint le même jour que le Roi-Soleil , le 1er septembre 1715.

Louis XIV était un grand admirateur de François GIRARDON et il s'est livré à plusieurs reprises à sa main habile afin qu'il réalise son portrait.

La communauté de destins de Louis XIV et de François GIRARDON s'est scellée au Château de Versailles qui doit une grande part de son aménagement et de son embellissement à ces 2 Hommes.

La liste des œuvres de François GIRARDON est longue. Elle n'est pas l'objet de mon propos, en suivant ce lien vous accéderez à une première ébauche de cette liste sur le site de Wikipedia
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Girardon

Mon propos est de discerner parmi les Christs en Croix qui sont attribués à GIRARDON ceux qui ont une probabilité d'être de sa main ?

Comme pour la majorité des sculpteurs qui jouissent d'une grande renommée, les velléités de possession d'un Christ en Croix du plus prestigieux sculpteur du XVIIe siècle français ont conduit à des attributions toutes plus fantaisistes les unes que les autres.

Le XIXe siècle, particulièrement marqué par l'esprit Marchand, a inscrit son nom sur une multitude d'ouvrages qui n'ont aucune justification artistique, ni avec le sculpteur, ni avec le XVIIe siècle !

J'observe qu'aucun Christ en Croix connu ne peut sérieusement être attribué à François GIRARDON.

Le seul Christ en Croix qui aurait pu être de sa main est celui qu'il a offert à la paroisse de Saint-Rémy à Troyes. Malheureusement il m'apparaît certain aujourd'hui que le Christ en Croix qui est en place actuellement au dessus de l'Autel n'est pas le Christ donné à l'origine par Girardon !

Avant de m'en expliquer, quelques mots tout de même sur François GIRARDON,

Son Père Nicolas était Maître-Fondeur dans la ville de Troyes. Il était fort probable que François GIRARDON affiche une disposition innée à concevoir et à réaliser des ouvrages. Cela n'a pas manqué et un goût certain pour le dessin s'est rapidement manifesté.

Son apprentissage chez un Menuisier-Sculpteur du nom de Baudesson, son intérêt pour les sculpteurs de sa ville comme Dominique Le Florentin et François GENTIL qu'il voulût rapidement imiter, sa rencontre avec le Chancelier SEGUIER qui possédait le château de Saint Liébault l'ont conduit vers Rome où il fût hébergé par Philippe Thomassin et conseillé par Pierre Mignard qui le dirigea vers Le Bernin …

Le talent exceptionnel de François GIRARDON et la sympathie qu'il inspirait à son entourage firent le reste et il marcha de succès en succès.

Il résida à Paris où il travailla chez Laurent Manière puis pour les Anguier. Il devint l'ami de Colbert, du peintre Le Brun, de Condé, de Boileau, de la Fontaine, de tous les grands hommes que comptait la France.

L'Académie Royale de Peinture et de Sculpture l'admit en 1757, François GIRARDON avait 29 ans. Il y franchît tous les échelons jusqu'au plus élevé lorsqu'il succéda à Pierre MIGNARD (1612-1695) au poste de Chancelier. Il conserva ce poste jusqu'à la mort qui l'a atteint à l'âge de 87 ans.

CHRIST DE FRANÇOIS GIRARDON - EGLISE DE SAINT-RÉMY - TROYES

CHRIST DE FRANÇOIS GIRARDON - EGLISE DE SAINT-RÉMY - TROYES

Il y a quelques années, au Bedeau qui m'autorisait à photographier le Christ de GIRARDON dans l'Eglise Saint-Rémy à Troyes, je faisais remarquer que je ne trouvais rien de XVIIe siècle dans ce Christ en Croix attribué à GIRARDON, son iconographie me paraissait plus tardive.

En réponse à ma remarque il m'a dirigé vers une inscription gravée sur une plaque de marbre où on lisait :

François Girardon, sculpteur ordinaire du Roy, recteur de l'Académie royale de peinture et sculpture, a donné le crucifix de bronze avec sa croix et les deux colombes de bronze doré qui sont sur la principale porte du chœur de cette église, et a fondé à perpétuité pour le repos de l'âme de Nicolas Girardon bourgeois de cette ville, et d'Anne Saingevin, ses pere et mere inhumez en cette église, une messe basse pour estre célébrée tous les vendredis de l'année entre dix et onze heures a l'autel dédié à la Ste Croix après qu'elle aura esté sonnée et tintée l'espace d'un quart d'heure, suivant le contract de la ditte fondation passé par devant Serqueil et Cligny, notaires à Troyes, le 5e juillet 1691.

Il ne s'agit pas de contester que François GIRARDON a fait don à l'Eglise Saint-Rémy d'un Crucifix en bronze avec sa Croix et deux colombes de bronze doré.

Ce qui est écrit et gravé dans le marbre est VRAI !

Il s'agit seulement de souligner que ce qui était VRAI le 5 juillet 1691 et qui supposait que le Crucifix installé était avec certitude celui de François GIRARDON est moins certain aujourd'hui.

A la Révolution la Croix en bronze du Christ fût vendue et le Christ et les deux colombes furent entreposés dans l'ancienne Abbaye de Saint-Loup. Un inventaire en date du 12 novembre 1793 atteste de leur présence à cette date.

Plus tard, le Christ seul fût rendu à l'Eglise, les deux colombes avaient disparu !

Rien n'établit que le Christ en Croix qui a été rendu à l'Eglise Saint-Rémy est le Christ original de GIRARDON et deux raisons me portent à croire qu'il ne l'est pas :

1.Le Christ en Croix donné en 1691 par GIRARDON à l'Eglise Saint-Rémy a été gravé par THOMASSIN or je n'ai trouvé trace d'aucune gravure de THOMASSIN qui représente le Christ actuel placé au dessus de l'Autel.

Toutes les gravures que j'ai vues de THOMASSIN représentent le Christ en Croix que je vous livre à la page suivante.

2.L'Iconographie du Christ en Croix actuel est identique à celle du Christ en Bronze livré par Philippe CAFFIERI l'Ainé à la Cathédrale de Bayeux en 1770. Ce qui explique son caractère XVIIIe qui m'avait frappé de prime à bord.

En conclusion :

OUI, François GIRARDON a fait don d'un Christ en Croix à l'Eglise Saint-Rémy.

NON il est peu probable que le Christ actuellement à l'église Saint-Rémy soit le Christ original de GIRARDON.

CHRIST EN CROIX DE GIRARDON FRANÇOIS GRAVÉ PAR S.THOMASSIN (1654-1733)

CHRIST EN CROIX DE GIRARDON FRANÇOIS GRAVÉ PAR S.THOMASSIN

Dans les Archives du Vendredi j'ai commenté ce Christ de GIRARDON gravé par THOMASSIN Simon 1er.

J'ai aussi évoqué THOMASSIN Simon II qui semble avoir signé ses gravures S.Thomassin. Il a gravé à son tour ce Christ de GIRARDON.

Ce sont les gravures de S. THOMASSIN qui ont été reproduites et vendues par d'autre éditeurs, en France et à l'Etranger.

Vous pouvez lire ou relire mes commentaires en suivant ce lien

La gravure ci-contre est une des innombrables gravures signées S.THOMASSIN (1654-1733). Elle est dédiée au Cardinal de Noailles, Archevèque de Paris (1651-1729)

CHRIST DE GIRARDON FRANÇOIS GRAVÉ PAR CHRISTOPH WEIGEL (1654-1725)

CHRIST DE GIRARDON FRANÇOIS GRAVÉ PAR CHRISTOPH WEIGEL (1654-1725)

Christoph WEIGEL est un graveur allemand à la réputation bien établie.

Il a gravé et édité en Allemagne le Christ de GIRARDON quasiment à l'identique des gravures de S.THOMASSIN.

Sa gravure démontre le succès iconographique rencontré par le Christ de GIRARDON dans d'autres grands pays européens.

LE CHRIST EN CROIX ATTRIBUÉ A FRANÇOIS GIRARDON A L'ABBAYE DE SAINT-RIQUIER EN BAIE DE SOMME

LE CHRIST EN CROIX ATTRIBUÉ A FRANÇOIS GIRARDON A L'ABBAYE DE SAINT-RIQUIER EN BAIE DE SOMME

Dans un livre paru en 1838, l'Auteur Antoine-Pierre-Marie GILBERT , décrit en ces termes un Christ en Croix situé dans l'Eglise de l'Abbaye de Saint-Riquier :

Dans l'entrecolonnement au-dessus du maître-autel est placé un grand Christ en bois, exécuté par François Girardon, statuaire , vers la fin du dix-septième siècle. Ce Christ est de la plus grande beauté, et l'admirable expression de la tête est digne de celles du Guide dont la renommée est si connue en ce genre.

C'est la tradition qui attribue l'origine de ce Christ au ciseau de François GIRARDON.

Sous toutes réserves donc ...

CHRIST EN CROIX EN IVOIRE DU XIXE SIÈCLE

CHRIST EN CROIX EN IVOIRE DU XIXE SIÈCLE ... D'APRES GIRARDON 1683

Ce Christ en Croix est en ivoire et il mesure 80 cm.

Il était ouvert aux enchères en avril 2012 à Alençon.

C'est une production du XIXe siècle dont le caractère Marchand est amplifié par une signature ancienne inscrite à l'encre C.L. D'après Girardon 1683

BEAU CHRIST EN IVOIRE DE TYPE JANSÉNISTE QUI N'EST PAS DE LA MAIN DE FRANÇOIS GIRARDON

BEAU CHRIST EN IVOIRE DE TYPE JANSÉNISTE QUI N'EST PAS DE LA MAIN DE FRANÇOIS GIRARDON

Il est fréquent d'attribuer à GIRADON François les Christs en Ivoire de belle qualité sculptés d'une seule pièce dont l'Iconographie est du type Janséniste.

Le bel ensemble ci-contre est constitué d'une vitrine qui porte l'estampille d'un Maître-Menuisier du XVIIIe siècle dans laquelle est présenté un beau Christ en Ivoire sculpté d'une seule pièce.

Pour éviter toute confusion sur l'identité du sculpteur du Christ en Ivoire il a été inscrit au dos du meuble à une date indéterminée Sculpsit Girardon !

Cet ensemble a été mis aux enchères en mars 2012 à Metz.

L'Expert de la Vente s'est montré prudent ...

Il a décrit le Christ en Ivoire étant d'après GIRARDON François. Néanmoins il le rapproche d'un autre Christ en Ivoire vendu par la maison Piasa en octobre 2007 qui avait été attribué quant à lui à François GIRARDON.

Son prix d'adjudication - 3 700€ - situé dans la fourchette d'estimations donnée par l'Expert - 3 000/4 000€, est très en deçà du Prix qu'aurait atteint une oeuvre attribuée avec certitude à la main experte de François GIRARDON

Cette fois, grâce à la prudence de l'Expert, Personne n'est tombé dans le piège d'une inscription fantaisiste.

Publié le 2 mars 2013